De la contre-utopie: (essai sur le roman de la decadence depuis l'attentat contre Charlie Hebdo)
Essono Tsimi, Eric , French - Graduate School of Arts and Sciences, University of Virginia
Blatt, Ari, PV-International Studies, University of Virginia
A la suite de Mark Lila qui pressentait qu’avec Soumission naissait un nouveau genre, à la suite d’un jeune chercheur canadien qui constatait dans ses travaux de thèse que les nouveaux romans d’anticipation français seraient des « pseudo-utopies » ou protoutopies, nous appelons genre cette forme littéraire spécifique qu’incarnent Soumission, Les Evénements, et 2084. Et nous nommons contre-utopie ce genre en effervescence. Nous avons construit notre objet tout le long de quatre chapitres, en faisant alterner et se rejoindre poétique et théorie. En raison de leur parution concomitante à l’émergence
de la contre-utopie, les travaux de Lavocat (2016) et Deluermoz & Singaravélou (2016) ont constitué une base d’édification et d’enrichissement théorique du concept proposé. Notre principal résultat est d’avoir ainsi proposé une première fixation du sens jusquelà hésitant de la contre-utopie. 2015 a été le lieu d’un carambolage entre faits et fictions, entre une série d’actes terroristes et une série de créations qui mettent toutes l’islam en scène. Les enjeux définitionnels et épistémologiques, qui du reste sont présents dans toutes les articulations de cette thèse, sont abordés dès l’ « avertissement». S’ensuit, au premier chapitre, un état rapide des connaissances et des tendances de la littérature française extrême-contemporaine. Nous nous intéressons à la grammaire de la contreutopie, aux conditions structurelles de son apparition, aux traits généraux et aux «liens de régularité qui unissent différentes oeuvres entre elles ». Cette utopie problématique, ci-après dénommée contre-utopie, est examinée au deuxième chapitre. Nous y démontons les ressorts contre-utopiques de Soumission (2015) et la mécanique de la décadence, sur la base de notions développées par Genette (1987). Le troisième chapitre est intitulé science et politique des événements et s’ouvre également sur des considérations de narratologie mais surtout de théorie littéraire. Y est mis en avant le jeu des interactions titulaires (entre les titres). Nous nous y attachons à mettre en oeuvre, sous un angle « clinique », à travers une lecture de Jean Rolin (2015) notamment, le fait poétique contre-utopique comme étant un événement et un discours autour de cet événement : un mot et une chose, pour emprunter de Foucault. Dans le chapitre terminal, intitulé La Fin du Monde, la Suite de l’Histoire, en référence à la fois à Boualem Sansal (2015) et Francis Fukuyama (1992) nous appréhendons la contre-utopie comme symptôme possible de la prétendue fin de la littérature. Du « signe » aux « symptômes » : nous nous penchons sur l’univers pathologique de la contre-utopie, pour ausculter les pulsions de mort de ses auteurs. Pour finir, nous envisageons la fin de la littérature comme une réactivation de la Querelle des Anciens et des Modernes et considérons la question des fins de la littérature comme non réductible (c’est l’une de nos conclusions) ni à la fiction ni à l’émotion. Ce chapitre terminal constitue une réflexion à double volet. D’une part sur la place de cette littérature diseuse de malaventure, cette littérature quivoue-à-la-mort. D’autre part sur la fonction de la littérature dans l’empire et la mise en jeu des croyances (Coleridge, [1817]1983 ; Bronner, 2015) et des savoirs d’opinion des sociétés occidentales.
PHD (Doctor of Philosophy)
Michel Houellebecq, Contre-utopie, Décadence, Boualem Sansal, Jean Rolin
French
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2019/04/10